Nous mentirait-on?

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Rite d'York

 

Le rite d’York est l'un des rites maçonniques les plus pratiqués aux États-Unis. On le retrouve très minoritairement en France.

 

Histoire

Le développement du rite d’York coïncide avec l'expansion de la Grande Loge des Anciens au début du xvIIIe siècle. Plus « christique », cette pratique rituelle sera même défendue par Laurence Dermott dans son Ahiman Rezon.

Si le rite d’York connaît sa genèse en Écosse, ce sont les francs-maçons irlandais qui contribueront à l'exporter en Amérique du Nord au xvIIIe siècle et au début du xxe siècle.

Il prend sa dénomination de rite américain par distinction avec le rite émulation qui se codifie lorsque les loges des Anciens et des Modernes s'unissent en 1813.

Les États-Unis, absentes de l'union entre deux conceptions de la franc-maçonnerie qui voit le jour en Grande-Bretagne, gardent ainsi toute l'originalité et l'authenticité de ce rite.

Les différences de rituel entre les Anciens et les Modernes n'étaient cependant que restreintes : inversion des mots sacrés, dispositions des lumières,...

Le contenu symbolique des grades de compagnons et de maître étaient différents.

Le Rite d'York est particulièrement développé aux États-unis où ses loges s'interdisent toute discussion de sujets politiques, religieux ou de tout autre sujet controversé et ne revendiquent comme objectif que celui de l'amélioration de ses membres.

Il n'est pas rare aux États-Unis que le rite d’York soit pratiqué en binôme avec le Rite écossais ancien et accepté.

 Ce constat a encouragé la création en 1957 à Détroit du Collège du rite d'York afin de défendre le rite et d'en faire sa promotion.

 

 

Degrés

Le rite américain York est divisé en de nombreux degrés regroupés en 5 catégories.

Première catégorie : loges bleues

1. Apprenti

2. Compagnon

3. Maître

Deuxième catégorie : Chapitres - Arche Royale

4. Maître de marque

5. Passé maître virtuel

6. Très excellent maître

7. Maçon de l'arche royale

Les rituels de la Royal Arch aurait été codifiés en 1797 à Boston.

 Il prend sa symbolique sur l'Arche d'Alliance contenu dans le Temple de Salomon.

Troisième catégorie : Conseil - Maçons cryptiques

8. Maître royal

9. Maître choisi

10. Super excellent maître

Les rituels du Conseil sont nettement plus modernes. On estime qu'ils sont codifiés au début du XIXe siècle.

Conseil qui complète les degrés du chapitre sous la référence mythologoqique des cryptes de Temple de Salomon.

Quatrième catégorie : Commanderies - Chevaliers du Temple

11. Chevalier de la Croix-Rouge

12. Chevalier de Malte

13. Chevalier du Temple

Les Commanderies ont une dimension davantage chrétienne que les Chapitres ou le Conseil. Elle passe du Temple de Salomon aux ordres Templiers.

Cinquième categorie : Bienfaisance - Ancient Arabic Order of the Nobles of the Mystic Shrine en abrégé A.A.O.N.M.S.

Accessible aux Maitres macons, les Shriners gerent aux USA et au CANADA des hopitaux pour enfants avec un devouement remarquable. Ces hopitaux sont aussi souvent des laboratoires et centres de recherches reputes pour maladies rares ou/invalidantes nécessitant des infrastructures et des competences medicales de pointe.

 L'acteur John Wayne fut notamment un Shriner celebre.

Catégorie "a cote" : ou Side Degrees ou Masonic Bodies

De nombreux autres degres maconniques non integres aux principaux systèmes ou categories répertoriés ci-dessus sont agreges ou partenaires de la maconnerie officielle aux Etats-Unis, comme aussi parfois en Angleterre ainsi que dans les pays et territoires sous anciennes constitutions ou patentes US ou anglaise.

 Sans les citer tous car ils sont nombreux, on peut mentionner cependant,

Ordre de la Croix Rouge de Constantin

Ordre des Chevaliers Macons

et citer les ordres apparentes qui recoivent des femmes :

Ladies Oriental Shrine of North America

Daughters of the Nile

Order of the Eastern Star

et ceux qui recoivent des enfants :

Grotto

Sciots

Order of the Amaranth

Daughter of Jericho

Il faut noter que certains degrés dits "de chaire" c'est-à-dire dont le titulaire a dirigé un atelier de l'une ou l'autre des catégories ci-dessus constituent souvent un ordre intérieur auquel ne sont reçus que ceux qui ont présidé.

 Ainsi en est-il des ordres intérieurs suivants :

Ordre de la Grande Prêtrise (Arche Royale)

Ordre de la Truelle d'Argent (Conseil cryptique)

Ordre des Chevaliers Prêtres du Temple (Commanderies)

Ordre de la Croix d'Honneur York ou Purple Cross (pour ceux qui ont dirigé des ateliers de tous les degres du système).

Le chapitre de la Marque tel qu'il est pratiqué en France à la GLTSO et au GODF ne correspond pas au rite d'York, le grade d'Arche Royale y étant absent.

Il s'agit de la Marque anglaise, et non pas des chapitres d'York tels qu'ils sont pratiqués en Ecosse ou aux Etats-Unis.

 

Spiritualité

Le rite d’York s'appuie particulièrement sur la Bible et plus encore sur l'Ancien Testament. Le signe d'ordre est parfois précédé par la formule «Dieu Garde» selon les rituels.

La démarche initiatique, des loges bleues jusqu'au degré de Chevalier de la Croix-Rouge de Constantin, contenue dans le rite de York veut que le franc-maçon passe du Temple de Salomon (de l'Ancien Testament) qu'il rebâtit en recevant la gnose en vue d'un Temple à la portée plus christique que poursuit les Commanderies.

Le rite d'York est moins formalisé que le rite Emulation, lui aussi censé être appris par coeur. Les pratiques de ce rite peuvent ainsi sensiblement varier d'un état des Etats-Unis à l'autre.

 

 

Rite York

Des origines monastiques probables

 

Nous retiendrons que le terme "YORK", s'il n'a aucun rapport avec les constitutions York de 926 sous le règne du Roi ATHELSTAN, comme la légende l'a laissé entendre, fait référence cependant à une spiritualité intense qui tire son origine des monastères culdéens et bénédictins des Iles britanniques, et tout particulièrement du Yorkshire.

 

Des Grandes Loges d'Irlande, York et d' Ecosse

 

I. La Grande Loge d'Irlande

Il existe des indices selon lesquels la maçonnerie spéculative existait en Irlande dès la fin du XVIIème siècle.

La Grande Loge d'Irlande fut constituée en 1729 ou 1730, et publia son Livre des Constitutions cette même année. Cette Grande Loge fut la première à délivrer des patentes à de nombreuses Loges militaires des régiments britanniques au cours de la période d'expansion coloniale.

Beaucoup, parmi ces premières Loges irlandaises comme dans celles attachées aux régiments conféraient le degré de Maçon de l'Arche Royale et de Chevalier Templier au sein de cet Ordre.

 

En 1790, le Député Grand Secrétaire de cette Grande Loge écrivait : "Nous, Francs-Maçons d'Irlande, sommes une branche des anciens Maçons d'York". Ses armoiries représentant le Lion, le Boeuf, l'Homme et l'Aigle, évoqueront bien des paysages connus des Frères travaillant à la Sainte Arche Royale.

 

Rappelons que Laurence DERMOTT, Grand Secrétaire de la Grande Loge des Anciens en Angleterre, avait été initié en Irlande en 1740 comme indiqué précédemment, et qu'elle s'opposa farouchement aux innovations introduites par les Modernes.

 

II. La Grande Loge York

La Grande Loge de toute l'Angleterre, ainsi qu'elle se nommait elle-même, disposait de comptes-rendus de travaux et de minutes de Loges antérieurs à 1705 mais revendiquait son origine comme datant des constitutions des Maçons élaborées sous Le Roi ATHELSTAN en 926.

Elle fut fondée en 1725. A quelques rares exceptions, celle-ci ne contrôla que des Loges de la région YORK. Ses activités furent intermittentes et entrecoupées de longues périodes de sommeil jusqu'en 1792 où elle cessa définitivement d'exister.

Du fait qu'elle était basée à York, la source et l'origine de toute la Maçonnerie anglaise, elle prétendait faire siens les anciens Devoirs et usages de la Maçonnerie opérative.

 Ainsi, du fait de cette localisation historique, de nombreuses Loges indépendantes se tournèrent vers elle pour y adhérer.

 

La Grande Loge York conférait régulièrement les degrés de Chevalier du Temple et de Maçon de la Sainte Arche Royale, comme 4ème et 5ème degrés, donnant à ceux-ci une filiation avec l'ancienne maçonnerie York. Plusieurs documents révèlent que les Loges de sa juridiction conféraient ces degrés.

   Alors que cette Grande Loge ne connut guère de développement, sa contribution majeure à la maçonnerie moderne fut ses liens historiques entre l'ancienne et la nouvelle maçonnerie.

Les Anciens utilisèrent souvent ses arguments historiques, profitant de sa faible activité et réactivité pour asseoir leurs propres aspirations et arguments, sans déclencher de contestations ni réactions de sa part.

 

III. La Grande Loge d' Ecosse

Alors que les Loges d' Ecosse admettaient des membres spéculatifs bien avant toute autre région des Iles britanniques, elle fut la dernière région de Grande Bretagne à former une Grande Loge. C'est la Loge de Canongate-Kilwinning à Edinburgh qui proposa la formation d'une Grande Loge en 1735.

  A cette époque, il existait plus de 100 Loges en Ecosse et beaucoup d'entre elles étaient encore constituées essentiellement de Maçons opératifs. Cette Grande Loge fut constituée en 1736 lorsque les délégués de 33 Loges se constituèrent en convent à cet effet.

Les Loges d' Ecosse furent numérotées sur la base de preuves documentaires prouvant leur ancienneté. La conséquence en est encore aujourd'hui qu'il subsiste des discussions sur leur ancienneté respective.

 

IV.Les autres Grandes Loges

Citons pour être complet, bien que ces corps n'eurent qu'une existence éphémère, les autres Grandes Loges suivantes :

La Suprême Grande Loge 1770 - 1775 ou 77 à Londres : Celle-ci est née de la scission de quelques Loges d'avec la Grande Loge des Anciens. La plupart de ces Loges rejoignirent les Anciens après sa disparition.

La Grande Loge d'Angleterre au Sud de la Rivière Trent qui fut fondée en 1779 par la Lodge of Antiquity à Londres, dans la sensibilité des Modernes, par le Frère William PRESTON dont nous aurons à reparler plus loin car il influença énormément la mise en forme des rituels.

Cette Grande Loge avait reçu patente de la Grande Loge d'York et retourna dans le giron des Modernes en 1789.

 

William PRESTON : Initié en 1760 dans la Caledonian Lodge travaillant sous patente de la Grande Loge des Anciens, il passe avec tous les Frères de sa Loge chez les Modernes en 1761.

  En 1777, il fonde la Loge ANTIQUITY et défie la Grande Loge des Modernes qui l'expulse donnant ainsi naissance à la Grande Loge au Sud de la rivière Trent le 29 Mars 1779 sous patente de la Grande Loge York.

Deux autres Loges appartiendront à ce corps et seront avec la première, réintégrée dans la Grande Loge des Modernes en 1789.

   PRESTON fut un ritualiste maçonnique réputé. A une époque où toutes les transmissions étaient orales, il entreprit la compilation des catéchismes et des instructions donnant ainsi naissance au rituel écrit.

 

Ces "Lectures Prestoniennes" furent sources d'inspiration et servirent de base aux rituels de type York développés et interprétés à partir de celles-ci.

  Ses "Illustrations of Masonry de 1772, et ses nombreuses rééditions augmentées à partir de 1775, suivies plus tard des instructions sur les premier, deuxième et troisième degrés de la Franc-Maçonnerie peuvent être considérées comme la base de l'instruction rituelle dans la plupart des juridictions américaines, sous une forme résumée, principalement due à Thomas Smith WEBB dont nous reparlerons plus loin.

   C'est également du fait de l'influence de ces lectures sur nombre de corps maçonniques que les Modernes l'invitèrent à rejoindre leur obédience et reconsidéreront leurs positions vis à vis des catéchismes par questions/réponses chers aux "Anciens", mais dans un premier temps rejetés par les "Modernes".

   L'oeuvre de PRESTON fut largement utilisée en Angleterre jusqu'en 1813, date à laquelle la Grande Loge Unie récemment formée adopta les révisions de HEMMING, substantiellement constituées du texte de PRESTON, remodelé dans sa forme.

 Mais déjà à ce moment là, la Maçonnerie était solidement implantée dans le nouveau monde.

 

Thomas DUNCKERLEY : Les Anglais avaient envoyé sur les théâtres des opérations coloniales, des troupes essentiellement constituées d'Ecossais et d'Irlandais, encadrés bien entendu par des Anglais, mais inférieurs en nombre.

Or la Grande Loge des Modernes s'interdit jusqu'en 1755 de donner des patentes aux Loges militaires, alors que la Grande Loge d'Irlande fut la première à en délivrer abondamment dès 1750, suivie par la Grande Loge d'Ecosse.

Là encore, le manque de réactivité et le rigorisme des Modernes pénalisa le développement des Loges de leur sensibilité, alors que l'on sait que les Irlandais, les Ecossais et les Anciens, tous attachés aux mêmes usages, avaient des échanges constants, des garants d'amitié et des correspondances fermement établies entre elles.

C'est dans ce paysage houleux du milieu du XVIIIème siècle qu'apparaît Thomas DUNCKERLEY. Officier de la Royale, il naquit en 1727 et reçut l'initiation le 10 Janvier 1754 dans une Loge de Portsmouth travaillant sous la constitution des Modernes mais au "vieux rite" puisqu'il reçut la même année tous les degrés y compris l'exaltation à la Sainte Arche Royale de Jérusalem, ce qui était conforme à la tradition des Anciens.

   Le Dr Oliver dit de lui dans son livre "Les révélations d'une équerre" : "Il avait des vues larges sur la Maçonnerie, et il méprisait les controverses sectaires. Il visitait fréquemment les Loges "Anciens" dans le but de vérifier les différences réelles entre les deux systèmes... il en cueillit soigneusement les fleurs... et les transplanta dans la Maçonnerie constitutionnelle ; car il trouva réellement chez les Anciens, à son étonnement non feint, plusieurs innovations importantes dans le système maçonnique, y compris quelques altérations des anciens Landmarks et une nouvelle utilisation du Mot de Maître". (The Ark and the Rainbow by Revd N.B. CRYER).

   Comme on peut le voir, Dunckerley était tout à la fois un Frère appartenant à la Grande Loge des Modernes, mais travaillant à la mode des Anciens, puisque sa Loge mère détenait patente de la première Grande Loge, bien avant le schisme de 1751 et sans doute les modifications constitutionnelles et rituelles de 1738.

   Commandant à bord du Vanguard, navire de la Royale Navy, c'est sur les théâtres d'opérations coloniales au Québec que Dunckerley rencontre les Loges militaires dont on a dit qu'elles étaient essentiellement d'inspiration "Anciens".

 Cette situation ne le gêne pas puisqu'il connaît le "vieux rite" et se fait admettre partout. Dunckerley est très certainement un Franc-maçon sympathique, chercheur et connaissant, non sectaire et plein de charisme, maniant le verbe et les idées avec une très grande aisance.

V.M. de sa Loge Vanguard, du nom de son navire, sa réputation et son oecuménisme marqué, tout comme sa fidélité à la Grande Loge des Modernes, en font un interlocuteur tout désigné pour les Modernes qui souffrent de l'influence grandissante des Anciens, surtout dans ces territoires d'outremer.

Comme PRESTON, il imposera aux Modernes le retour au catéchisme par questions/réponses, considéré comme archaïque par les Modernes mais tellement prisé des Anciens.

Nul doute qu'il participera à la réécriture d'anciens rituels, et qu'enfin, il s'impliquera dans la rédaction de la Charter of Compact de 1766 relative à la reconnaissance de la Maçonnerie de l'Arche Royale, et le rapprochement des positions entre les Modernes et les Anciens, qui deviendra perceptible dès 1770, pour devenir effective en 1813, après sa mort.

Pour l'anecdote, il obtiendra de la Grande Loge le droit d'initier, passer et élever des Maçons à bord de n'importe quel navire ou vaisseau. Il fera quatre fois le voyage à Québec sur son navire, le Vanguard, puis encore à bord du Prince en 1761.

Il se fera désigner par les Loges militaires du Québec, d'obédience "Anciens", comme postulant Grand Maître Provincial avant un retour en Angleterre, où il recevra confirmation de la Grande Loge des Modernes de sa nomination de Grand Maître de District sur les Loges du Québec, auxquelles il délivrera de ce fait double patente.

Il faut bien y voir là son charisme et l'estime dans laquelle les FF militaires le tenaient, puisque après son départ définitif pour cause de retraite, la plupart de ces Loges renvoyèrent leurs Chartes aux Modernes.

 

 

V. La propagation en Amérique du Nord

   Alors que la Franc-Maçonnerie spéculative était en pleine formation en Europe et en Angleterre, des Loges se formaient dans les colonies d'Amérique, en grande partie du fait de la présence de troupes coloniales et de garnisons envoyées sur ces théâtres d'opérations extérieures.

   Les plus anciennes références à une Loge tenant ses assemblées dans les colonies d'Amérique datent d'avant 1730.

Il s'agit des minutes de la Loge Saint-John, à Philadelphie, ainsi qu'un avant projet de ses statuts.

Nous disposons également de la constitution manuscrite de cette Loge, écrite par le Frère CARMICK et datée de 1727, laquelle, d'après une tradition bien fondée et défendue par la Grande Loge de Pennsylvanie, était l'autorité maçonnique légale sous laquelle la première Loge et Grande Loge américaine ont été formées, cette dernière au cours de l'année 1731, étant de ce fait la troisième Grande Loge de Maçons Libres et Acceptés du monde, après l'Angleterre (1717) et l'Irlande (1729-30).

   La Grande Loge de 1731 toutefois, devenue "Moderne" en acceptant les modifications ritualistes venues d'Angleterre, ne survécut pas à l'influence des "Anciens" qui fondèrent une seconde Grande Loge concurrente, laquelle reçut patente en 1761 et supplanta définitivement la précédente dès le début de la guerre d'indépendance (1775 - 1783).

   Cette Loge de St John était une Loge sans patente car sous les "Old Charges", les Frères avaient la permission de s'assembler, de former une Loge et d'y travailler sans patente ni charte.

Si une telle Loge se souchait et travaillait de façon définitive, elle devenait alors une "Loge de temps immémorial" et donc une Loge régulière.

   Benjamin FRANKLIN, qui deviendra Maçon à Philadelphie en 1731, affirme dans le journal officiel de Pennsylvanie n°108 édition du 3 au 8 Décembre 1730, que plusieurs Loges maçonniques ont été fondées dans la Province dernièrement.

   La Grande Loge de Pennsylvanie a toujours prétendu jusqu'à ce jour, que les tous premiers rituels en Amérique étaient identiques à ceux pratiqués aujourd'hui encore sous sa juridiction, c'est-à-dire conformes au "vieux rite".

   Pour être objectif, on peut également faire mention de la présence dès 1634 au Canada, alors appelé la Nouvelle France, d'un Maçon, Lord ALEXANDER, fils du premier Comte de Stirling (Ecosse), maître d'oeuvre du Roi Charles Ier, qui établit une colonie écossaise sur les rives du Saint-Laurent.

Lord ALEXANDER était membre de la Loge Edinburgh n°1 de Mary's Chapel, dont le livre des minutes remonte à 1599, et selon la tradition, existait déjà en 1491.

   C'est en 1738 qu'est consacrée la première Loge canadienne à Annapolis, NOVA SCOTIA.

Les Francs-Maçons de BOSTON (Massachussetts), furent tout aussi actifs que ceux de Philadelphie au cours de cette première époque.

Il n'y a cependant pas de traces de réunions antérieures à 1733.

En 1733, Henry PRICE fut nommé Grand Maître Provincial de Nouvelle Angleterre par la première Grande Loge d'Angleterre.

PRICE inaugura la Grande Loge Provinciale le 30 Juillet 1733 à Boston et en constitua la "Première Loge". Celle-ci, St-John's Lodge, existe toujours. C'est ainsi que le Massachusetts revendique l'antériorité d'établissement de la "maçonnerie régulière" dans les colonies américaines.

Compte tenu de ce qui a été dit plus haut, il s'agit donc d'une revendication qui ne se justifie que sous l'angle d'une "régularité" de sensibilité "Modernes".

   En Juin 1730, une commission nommait Daniel COXE, Grand Maître Provincial de New York, de Pennsylvanie et du New Jersey, sans que l'on ait toutefois traces d'une quelconque activité de sa part.

   James OGLETHORPE, fondateur de la colonie de Géorgie et premier gouverneur, fonda le 10 Février 1733 "The Lodge at Savannah" qui devint en 1776 la "Solomon's Lodge".

Des Grands Maîtres Provinciaux furent nommés pour différents autres territoires coloniaux au cours des 50 années suivantes.

Lors de la Révolution américaine, le MASSACHUSSETTS, la PENNSYLVANIE et NEW-YORK avaient tout à la fois des Grandes Loges Provinciales sous constitutions des "Modernes" et des "Anciens".

 Ces Grands Maîtres Provinciaux délivraient à l'occasion des chartes à des Loges d'autres territoires sans autorité maçonnique constituée.

De surcroît, un nombre significatif de "Loges de temps immémorial", étaient créées ; la plupart d'entre elles étaient issues des Loges militaires attachées aux régiments britanniques stationnés dans les colonies.

La plupart de ces Loges militaires avaient reçu patentes de la Grande Loge d'Irlande et pratiquaient la maçonnerie des "Anciens".

   La nature aristocratique de la Grande Loge des Modernes, en Angleterre, se retrouvait dans les colonies, ce qui eut pour conséquence, lors de la guerre d'indépendance, que la plupart des membres des Loges de leur sensibilité étaient loyalistes et conservateurs ; au cours de ces années de guerre, la plupart repartirent en Angleterre, causant ainsi l'extinction des Loges de "Modernes" dans le nouveau monde.

  Avec la victoire, les Francs-Maçons américains souhaitèrent former leur propre Grande Loge.

Ils approchèrent à plusieurs reprises George WASHINGTON, pour lui proposer d'accepter la Grande Maîtrise sur les l'Etats-Unis mais celui-ci déclina l'offre.

C'est ainsi que chaque l'Etat constitua sa propre Grande Loge avec bien des difficultés, dans la mesure où les Loges pratiquaient une grande disparité de rituels, issus de différentes juridictions - Irlande, Modernes, Anciens, Ecosse, vieux rite pour les "time immemorial lodges" et même France avec l'influence de LAFAYETTE et du corps expéditionnaire français.

Néanmoins, 13 Grandes Loges souveraines furent finalement constituées dès la fin du XVIIIème siècle.

Il existe aujourd'hui 49 Grandes Loges sur le territoire des Etats-Unis, l'ALASKA étant sous la juridiction de l'Etat de Washington, et HAWAI, sous celle de l'Etat de Californie.

 

Initialement, quelques-unes de ces nouvelles Grandes Loges se définissaient elles-mêmes comme relevant de la tradition des Anciens Maçons York, signifiant par là leur adhésion aux usages et constitutions des Anciens, d'autres se reconnaissant dans ceux des "Modernes".

Aujourd'hui encore, on en retrouve la trace dans les Grandes Loges des Etats-Unis en fonction des appellations suivantes :

· Maçons anciens francs et acceptés

· Anciens Francs Maçons

ou

· Maçons libres et acceptés.

Les Grandes Loges américaines sont souveraines dans le gouvernement de la Franc-Maçonnerie symbolique sur le territoire de leur juridiction.

 Chacun de leurs membres et organismes affiliés est soumis à leurs Lois et Constitutions.

Dans la pratique, les droits et privilèges de ces organismes, établis de longue date, requièrent d'être Maître Maçon.

Toutefois, malgré les différences, chaque Maçon américain, est accueilli en Frère dans chacune des Grandes Loges qu'il pourrait visiter.

 

VI.Les attaques anti-maçonniques en Amérique du Nord

La période de 1826 à 1845 qui suivit l'affaire MORGAN fut une période noire pour la Maçonnerie américaine.

 Comme cela s'était déjà produit en Angleterre, et sans doute véhiculé pour les mêmes raisons, on vit dès 1798 naître une agitation anti-maçonnique hostile, véhiculée par des prédicateurs itinérants.

Des pamphlets et des brochures furent régulièrement publiés dès cette époque, soit plus de vingt déjà avant l'affaire MORGAN qui allait tout embraser.

   Cette affaire MORGAN fut celle d'un crime par intérêt sur lequel nous ne nous étendrons pas ici, mais nous renvoyons les Frères curieux d'en connaître ce qui a pu être écrit à ce sujet, à la lecture d'autres ouvrages, son développement n'ayant pas d'intérêt direct avec notre sujet.

Le climat de l'époque était déjà tellement mauvais que cette affaire déclencha une véritable chasse aux sorcières contre la Franc-Maçonnerie.

   On peut se faire une idée des événements et de leur intensité, à la lecture de l'ouvrage de Dwight SMITH - Goody heritage : One hundred fifty years of Craft Freemasonry in Indiana -

"La période de 1826 à 1845 fournit un exemple frappant des excès où l'intolérance sournoise peut mener.

La Grande Loge de New York en 1826 comptait 500 loges, mais n'en avait plus que 65 en 1846...

Dans le Vermont, la maçonnerie s'éclipsa presque totalement pendant près de treize ans ; une proposition déposée en 1833 pour délier tous les Maçons de leur serment et dissoudre toutes les Loges et la Grande Loge fut adoptée par 79 voix contre 42...

Le Michigan, par Décret de son Grand-Maître Lewis CASS cessa ses travaux en 1829...

L'Illinois se mit en sommeil la même année...

Dans le Maine et en Pennsylvanie, un grand nombre de Loges renvoyèrent leurs Chartes et, dans une moindre mesure, le Massachusetts, le Connecticut, Rhode Island ainsi que plusieurs autres, connurent une semblable situation...

Les collectivités locales adoptèrent un irrépressible esprit de persécution qui se propagea comme un incendie à travers tout le pays Les membres de la Fraternité subirent l'ostracisme social le plus complet : les foules pillèrent les Temples, détruisant les biens et agressant les membres assemblés...

Des Chartes furent volées, les Temples et le mobilier dégradés...

  Par milliers, les Frères proclamèrent leur renonciation publique à tout lien avec la Franc-Maçonnerie, et même parmi eux, celui qui avait été pendant 15 ans le Premier Grand Surveillant de la Grande Loge de New York...

    D'anciens Maçons, soucieux de se dédouaner, organisèrent même des démonstrations publiques au cours desquelles ils ouvraient les travaux, admettaient des individus abjects et conféraient les degrés devant des auditoires ravis...

   Aucune instance de la société n'échappa au venin ; chaque association en fut empoisonnée ; des familles furent désunies, frère contre frère, père contre fils, épouse contre mari...

 

Les communautés culturelles filèrent à la débandade, les laïcs écartés du culte dans un sursaut de bigoterie, les sacrements chrétiens refusés aux membres de la fraternité...

 

   Le système scolaire fut déchiré : des enseignants et des élèves expulsés. L'excitation fut telle qu'à plusieurs occasions, des enfants même furent battus et insultés pour être enfants de Maçons ; des abécédaires et des livres scolaires anti-maçonniques furent même publiés...

   Tous ces efforts furent fait pour priver les corps maçonniques de leurs droits associatifs et faire voter des Lois empêchant les Maçons de célébrer leurs cérémonies et de tenir leurs réunions...

En 1842, il existait 141 journaux anti-maçonniques, publiés dans 15 états, ainsi que des almanachs de la même veine..."

   Pour combattre toutes ces divulgations, et suivant en cela un processus semblable à celui qui avait été mis en place en Angleterre quelques 75 ans plus tôt, des modifications furent volontairement apportées à certaines parties du rituel.

Les Comités de tuilage, dans les Loges, eurent tôt fait d'adopter une attitude de totale suspicion à l'égard de tout visiteur inconnu de passage.

Le manque d'uniformité des rituels devint ainsi non seulement un obstacle dans les relations entre Loges de juridictions différentes, mais aussi entre des Loges d'un même Etat.

Aussi, dès 1839, la crise déclinant, il apparut indispensable de rassembler la Franc-Maçonnerie américaine pour réunir ce qui avait été dispersé par ces événements douloureux et tenter d'unifier les pratiques et usages, l'une des singularités des Frères américains ayant depuis toujours, consisté en une conviction persistante que les rituels maçonniques devaient être partout identiques, à la lettre près.

Des réunions sur ce thème avaient déjà eu lieu dès 1822, et c'est la Grande Loge de l'Alabama qui relança le processus en Décembre 1839.

Cette initiative conduira au Congrès de Baltimore de 1843, objet d'un développement particulier.

 

VII.La situation après 1813

En 1813, intervint en Angleterre la fin du schisme déclaré en 1751 par la fondation de la Grande Loge des Anciens.

Perceptible à partir de 1766/70, le rapprochement des positions entre les "Anciens" et les "Modernes" conduisit à la fusion des deux juridictions en 1813, sous le nom de Grande Loge Unie d'Angleterre, dénomination qu'elle porte toujours aujourd'hui.

Afin de contribuer au rapprochement des positions entre les deux corps, une commission ad hoc travailla sur les rituels dans le cadre d'EMULATION LODGE OF IMPROVEMENT, qui donnera naissance à une synthèse des rituels ancien et moderne, mais dans un esprit de consensus a minima.

Ce rituel est connu aujourd'hui sous la dénomination de rite Emulation ou Anglais.

Mais les communications étaient lentes, parfois même inexistantes, de telle sorte que les Loges américaines, si elles eurent vent pour certaines, des modifications de 1813, n'en tinrent aucun compte, ayant elles-mêmes acquis des habitudes fermement établies.

La base rituelle du nouveau monde était restée largement basée sur les travaux de William PRESTON déjà cité, sous une forme résumée due à Thomas Smith WEBB auteur de "The Freemason's Monitor, or Illustration of Masonry : in two parts" de 1797.

Cette version WEBB des instructions, très largement empruntée à PRESTON, devint dans une très large mesure, le rite américain, et le demeura pendant la première moitié du XIXème siècle, sans subir de modification notoire.

   Des disparités rituelles tirant leurs origines des différentes transmissions reçues et des variantes introduites par la tradition d'oralité, naîtra la prise de conscience d'une recherche d'uniformisation dès 1822, mais avortée pour cause d'antimaçonnisme, et reprise à la fin des années 1830.

 Le congrès de Baltimore de 1843 aura, malgré l'imperfection de ses résultats, le mérite d'uniformiser les instructions sur la base des travaux de PRESTON repris par WEBB, d'ancrer la maçonnerie américaine dans une dominante de sensibilité Anciens et York, et d'uniformiser presque complètement certains points du rituel et du cérémonial spécifiques au système américain York.

 

VIII. Le Congrès de BALTIMORE 1843

Nous avons eu l'occasion d'expliquer que le nouveau monde avait reçu en héritage ses sources maçonniques des diverses Grandes Loges du Royaume Uni et même de France, ces origines expliquant les usages variés dans la pratique du métier, aggravés par la folie anti-maçonnique de la période 1826 - 1842.

Par ailleurs, la guerre d'indépendance ayant définitivement consolidé les Anciens, davantage populistes, démocratiques et séparatistes, des efforts d'uniformisation furent ainsi entrepris dès 1822.

Ceux-ci allaient également se heurter au caractère fédéraliste et politique d'un pays neuf où les distances et étendues territoriales ne pouvaient favorablement oeuvrer en faveur d'un système centralisé de type européen.

En 1822 donc, un groupe de Francs-Maçons, par ailleurs membres du Congrès des Etats-Unis, prônant l'uniformisation de la Franc-Maçonnerie, provoqua une réunion le 9 Mars de cette même année au Sénat, à Washington.

 Des résolutions suggérant que toutes les Grandes Loges aux Etats-Unis considèrent sérieusement la constitution d'une Grande Loge Nationale furent adoptées, et un Convent convoqué pour Février 1823 à Washington D.C.

   Douze Frères illustres, dont John MARSHALL de Virginie et Henry CLAY du Kentucky, furent constitués en un Comité chargé d'expédier à toutes les Grandes Loges les résolutions votées, ainsi qu'un mémorandum en recommandant l'adoption.

Cette proposition fut très diversement accueillie...

La Grande Loge de l'Ohio, par exemple, conclut qu'une Grande Loge Générale ne créerait que confusion et désordre au sein de la Fraternité toute entière, mais elle déterminait en même temps que des réunions de délégués des différentes juridictions ne pourraient être que bénéfiques, et que le Très Respectable Grand Maître, le Frère John SNOW, était constitué délégué de la Grande Loge à telle Convention des Grandes Loges qui serait réunie pour établir l'uniformisation des rituels.

La Grande Loge d'Indiana circularisa les Loges de sa juridiction, et devant l'opposition massive, résolut qu'une telle Grande Loge Générale n'apparaissait pas un projet "ni expédient ni nécessaire".

La Grande Loge de Massachusetts de détermina dans le même sens...

Une tentative ultérieure fut faite dont le but ressort clairement de la résolution votée par la Grande Loge d'Alabama lors de sa Communication annuelle de Décembre 1839, envoyée à toute sa correspondance en ces termes : "Décidé, que toutes les Grandes Loges de la correspondance de la Grande Loge d'Alabama soient invitées à élire un délégué, ceux-ci devant se réunir en Convention Générale le premier Lundi de Mars 1842, dans la ville de Washington, avec pour mission de déterminer un mode cérémoniel uniforme pour toutes les Loges des Etats-Unis, et de décider sur d'autres bonnes règles dans l'intérêt et pour la sécurité de la Fraternité".

   La Grande Loge d'Alabama, instigatrice du projet, devait constater lors de son Assemblée annuelle en 1840 que seuls, le Connecticut, New York et le Maryland approuvaient le projet tandis que le Kentucky déclinait l'invitation.

   Elle votait alors de notifier à toutes les Grandes Loges qu'elle serait reconnaissante de recevoir tout avis sur ce projet.

    En Décembre 1841, l'Assemblée annuelle d'Alabama était informée par son Grand Secrétaire que le projet ainsi soumis à toute sa correspondance, de se réunir en Convent à Washington en Mai 1842, avait reçu un accueil favorable des Grandes Loges de New Hampshire, New Jersey, Pennsylvanie, Massachusetts, Rhode Island, New York, Michigan, Tennessee et Mississipi, qui y voyaient une action éminemment bénéfique à la sécurité de la Fraternité, et pour faire qu'il existe au moins parmi les Etats-Unis, une uniformité rituelle.

    En Décembre 1842, les délégués d'Alabama réunis en Grande Loge apprenaient que la Convention de Washington n'ayant pu parvenir à une uniformisation des rituels, recommandait que chaque Grande Loge nomme un ou plusieurs Frères expérimentés, dénommés Grands Instructeurs, pour se réunir et se mettre d'accord sur : Le schéma d'instruction nécessaire et convenable devant être remis aux Loges et à la Fraternité,

   La décision de se réunir en quelque lieu central, au moins tous les trois ans, pour y comparer leurs "instructions", et y corriger toute variation qui y serait constatée.

   Cette Convention de Washington recommandait en outre que la première réunion des Grands Instructeurs ainsi proposée, eût lieu à Baltimore, le second Lundi de Mai 1843.

   Ce qui fut débattu lors de cette Convention est d'intérêt pour plusieurs raisons, bien que ce qu'il advint de ses recommandations fût rapidement devenu un sujet brûlant de controverse à travers le pays. Ses conséquences n'ont d'ailleurs pas complètement disparu de nos jours...

   Ces travaux nous sont essentiellement connus par le texte introductif, sous la plume de Dwight L. SMITH lors de la réédition du "The Masonic Trestle Board, adapted to the National System of Work and Lectures", premier résultat tangible de ce Congrès.

   Le rituel étant transmis oralement, et aucun rituel ou moniteur n'existant dans les premiers temps du développement de la Maçonnerie, les différences cérémonielles locales étaient inévitables.

 Le seul fait que ce Congrès ait été réuni montre bien le souci d'un certain nombre de Maçons, de voir un rituel uniformisé et univoque mis en place.

   Seize des vingt huit juridictions alors en activité aux Etats-Unis furent présentes à ce Congrès.

Le Congrès maçonnique National qui s'ouvrit à Baltimore - Maryland - le 8 Mai 1843 et demeura en session pendant neuf jours fut, parmi ces tentatives, un événement d'une portée capitale dans l'histoire de la Franc-Maçonnerie aux Etats-Unis, en ce sens qu'il fut révélateur d'une vraie prise de conscience du problème.

 Cependant, de telles réunions, avant et après Baltimore semblent démontrer qu'aucune uniformisation, ne put et peut-être ne pourra jamais sans doute, être réalisée.

A quelques exceptions près, les délégués tombèrent cependant d'accord sur les moindres détails.

Toutefois, rentrés dans leurs Etats, il apparut qu'ils étaient presque tous en total désaccord quant à ce qu'il s'était passé à Baltimore, et lorsque les travaux du Congrès (ou plutôt ce que l'on pensa que furent leurs conclusions), furent réunis et mis en forme par Charles W. MOORE du Massachusetts et Stephan W.B. CARNAGY, ancien Grand Maître du Missouri, dans "The Masonic Trestle Board", on s'aperçut qu'ils différaient d'un autre compte-rendu préparé par John DOVE, Grand Secrétaire de Virginie, et présumé provenir des mêmes sources.

   Quoiqu'il en soit, les conclusions de la Convention furent très largement suivies. Elles résidaient dans l'adoption d'un système rituel conçu sur le modèle du rituel "WEBB" dans son état le plus pur, et qui demeure connu sous l'appellation de "Rituel de Baltimore". Peu à peu, la plupart de ses recommandations furent adoptées par les juridictions américaines.

   Si le Congrès de Baltimore ne parvint pas complètement aux objectifs qu'il s'était assigné, c'est-à-dire l'uniformisation du rituel, il y contribua sur notamment quatre points significatifs :

· Due Guard ou Signe du Serment

· Bijou mobiles et inamovibles

· Le traitement des affaires administratives au degré de Maître Maçon

· L'universalité religieuse

   Enfin, nous devons au Congrès de Baltimore et à sa "commission du travail ésotérique", l'interdiction d'imprimer ou d'écrire le rituel, ni de le vendre, l'acheter ou même de le posséder.

   C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui encore, la plupart des Grandes Loges n'éditent aucun rituel écrit, ou si elles le font, le texte est imprimé en codes ou avec les seules initiales des mots (Grande Loge de Californie par exemple).

   L'autre objet de ce Congrès, officieux et beaucoup plus délicat, fut de tenter une fois encore, de constituer une organisation nationale permanente regroupant toutes les Grandes Loges des Etats-Unis en réunions triennales.

Rien ne devait sortir de cette nouvelle tentative, de par la crainte qu'une telle organisation ne débouchât finalement sur une Grande Loge Générale des USA dont la seule perspective suscitait une très vive opposition depuis déjà bien longtemps.

 

IX. Synthèse et essai de conclusion

Par un concours de l'histoire qui ne doit guère au hasard, la franc-maçonnerie américaine, attestée de façon prouvée, a finalement pratiquement le même âge que la maçonnerie anglaise, 1717 pour cette dernière, 1729 pour celle du nouveau monde, soit 12 petites années...

   Les guerres coloniales d'Amérique, conduites par l'Angleterre anglicane avec des fantassins irlandais catholiques romains, les exactions, persécutions et souffrances endurées par les populations et les troupes, en Nouvelle France et Acadie catholiques, le pouvoir hégémonique de la couronne britannique envers ses colonies, le gouvernement de la première Grande Loge à tendance néo paganiste, autocratique et centralisateur, créèrent des schismes et des divisions aussi bien entre l'Angleterre et ses colonies, qu'entre les Grandes Loges d'Irlande et d'Angleterre pour des raisons évidentes, et jusqu'au coeur même de l'Angleterre.

    Il est de ce fait logique que la maçonnerie irlandaise se soit propagée en nombre sur les territoires du nouveau monde, bientôt relayée par celle des Anciens et inspirée des traditions York.

Si les Modernes eurent leur part de succès dans cette première étape, ils souffrirent toujours d'un système centralisateur qui commandait que les Loges de leur ressort reçoivent patente en bonne et due forme pour exister, ce que les Modernes ne firent pas avant 1755.

Pendant ce temps, sous les "Old Charges", la maçonnerie irlandaise d'inspiration York et Anciens, fleurissait sans patente et en toute régularité au hasard des déplacements de troupes et dans les villes de garnisons. Elle se souchait.

   Avec la bourgeoisie venue faire fortune dans les nouvelles colonies, les Modernes trouvèrent un réservoir important de Frères loyalistes et conservateurs soumis à leur Grande Loge, mais comme en Angleterre, soucieux de préserver leurs acquis.

Leur réticence à recevoir dans les Loges les ouvriers et gens de basse extraction, les conduira à perdre définitivement le combat contre les Anciens avec l'arrivée de la guerre d'indépendance, qui fut celle des "labour" contre les "tories".

   On retrouvera par ailleurs des clivages similaires dans les développements de la Maçonnerie au Mexique...

   Au début du XIXème siècle, les nouveaux Etats-Unis sont donc face à un paysage maçonnique morcelé dont l'unification sera retardée par les graves événements anti-maçonniques de la période 1826 - 1842.

   De ce fait, la maçonnerie américaine ne sera plus concernée par le Traité de l'union de 1813, réunissant les deux anciennes rivales anglaises et instaurant le rite Emulation.

 



04/05/2012

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