Le gendarme européen des données personnelles démolit ACTA
La Commission voulait une analyse juridique ?
Alors qu’ACTA attaque sa dernière ligne droite vers le vote-rejet devant le Parlement Européen,
le contrôleur aux données personnelles (CEPD) vient d’appuyer plus profondément
encore les critiques contre cet accord international. En février 2010, il avait déjà publié
un avis pour rappeler à la Commission européenne la sensibilité du sujet de la vie privée et
des données personnelles.
Aujourd'hui, un second avis rajoute une couche en plongeant dans les détails du texte.
« Les mesures d'ACAC visant à faire respecter les droits de propriété intellectuelle dans
l'environnement numérique pourraient menacer la vie privée et la protection des
données si elles ne sont pas correctement appliquées » résume en substance le
Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) qui vient de publier un
avis sur la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'Accord commercial
anticontrefaçon (ACAC ou ACTA en anglais).
Au Conseil, à la Commission ou aux eurodéputés, le CEPD souligne que le manque de
précision d’ACTA « peut avoir des effets secondaires inacceptables sur les droits fondamentaux
des individus, si ces mesures ne sont pas correctement appliquées ».
Selon le gendarme des données personnelles et de la vie privée en Europe, en effet
« bon nombre des mesures visant à renforcer l'application des droits de propriété intellectuelle
en ligne pourraient impliquer la surveillance à grande échelle du comportement
des utilisateurs et de leurs communications électroniques ».
Il rappelle que selon les principes européens – consacrés notamment par la
Convention européenne des droits de l’Homme, les mesures attentatoires à la vie privée
des citoyens ne peuvent s’envisager que « si elles sont nécessaires et proportionnées à
l'objectif de faire respecter les droits de propriété intellectuelle ».
C’est le principe de proportionnalité qu’avait appliqué notamment le Conseil
constitutionnel pour l’interprétation de l’article de la loi Hadopi permettant le
blocage et/ou filtrage.
« Bien que davantage de coopération internationale soit nécessaire pour l'application
des droits de propriété intellectuelle, les moyens envisagés ne doivent pas se faire au
détriment des droits fondamentaux des individus.
Un juste équilibre entre la lutte contre les violations de la propriété intellectuelle et les
droits à la protection de la vie privée et des données personnelles doit être respecté.
Il semble que l'ACAC n'a pas pleinement réussi à cet égard. »
En langage diplomatique, c’est une gifle qu’assène le CEPD dans son communiqué.
La Commission européenne qui voulait saisir la CJUE afin d’analyser juridiquement la
conformité d’ACTA au droit européen… et de geler le vote au Parlement, est servie :
"Les mesures qui permettent la surveillance indifférenciée ou généralisée du
comportement des utilisateurs d'Internet et/ou de leurs communications électroniques,
dans la lutte contre des infractions légères, à petite échelle et sans but lucratif
seraient disproportionnées et contraires à l'article 8 de la CEDH, aux articles 7 et 8 de
la Charte des droits fondamentaux et à la directive sur la protection des données;
Bon nombre des mesures volontaires de coopération en matière de mise en application
entraîneraient un traitement de données à caractère personnel par les fournisseurs d'accès
à Internet allant au-delà de ce que législation européenne autorise;
L'ACAC ne contient pas de limitations et de garanties suffisantes, comme une protection
juridictionnelle effective, une procédure régulière, le principe de présomption d'innocence
et le droit à la protection de la vie privée et des données personnelles".
Immédiatement, Françoise Castex applaudit cet avis qui vient « au plus haut niveau [confirmer]
les craintes de millions de citoyens et renforcer la position des socialistes européens
qui se sont d'ores et déjà prononcés pour le rejet de cet accord ».
L’eurodéputée rappelle que « cela fait près de deux ans que nous attirons l'attention
sur l'article 27 selon lequel un fournisseur d’accès à internet (FAI) pourrait être
dans l’obligation, si « une autorité compétente » lui demande, de fournir aux
ayants droit (maison de disque, producteur, artiste, etc.) les
« renseignements suffisants pour lui permettre d’identifier un abonné
dont il est allégué que le compte aurait été utilisé en vue de porter atteinte à des droits. »
source:pcimpact
24/04/2012
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