147 sociétés détiennent 40 % de la richesse mondiale
Un noyau de 147 sociétés (au centre) évolue au sein d'un groupe de 1318 multinationales qui sont au coeur de ce vaste réseau d'interconnexions planétaires.
Pierre Couture
Le Soleil
(Québec) Personne ne se doutait que l'économie mondiale était tissée aussi serré. Mais voilà. Tout près de la moitié de l'économie de la planète serait «dirigée» par un petit groupe très sélect d'une centaine de sociétés financières et traditionnelles, tout au plus.
Trois professeurs de l'École polytechnique de Zurich (Stefania Vitali, James B. Glattfelder et Stefano Battiston) viennent de publier une étude très éclairante sur la concentration du pouvoir financier au sein de l'économie mondiale. Leur conclusion? Seulement 147 sociétés (banques, assureurs, firmes de placements, fonds d'investissements, fonds de pension, sociétés traditionnelles, etc.) détiennent 40 % de la richesse de l'économie mondiale.
Au sein de ce cercle restreint, une vingtaine de grandes banques ont été identifiées, dont Barclays, JPMorgan, UBS, Merrill Lynch, Deutsche Bank, Morgan Stanley, Bank of America, ING et BNP Baripas notamment. On parle d'un énorme «noeud papillon» où le pouvoir est concentré dans un groupe de joueurs au centre ayant des liens en périphérie.
Qui sont-ils? Parmi les cinq sociétés à la tête de ce puissant réseau de financiers, on note la banque britannique Barclays, le fonds américain Capital Group, la firme de gestion américaine Fidelity Investments, l'assureur français AXA et le fonds State Street Corporation de Boston.
Au 35e rang, on retrouve la canadienne Sun Life.
À partir d'une liste de 37 millions de sociétés enregistrées dans le monde, les chercheurs ont identifié 43 000 multinationales possédant plus d'un million de liens directs et indirects entre elles.
Or, en poussant leurs travaux d'analyse un peu plus loin, les chercheurs ont constaté que 1318 multinationales possédaient des participations dans des sociétés produisant 60 % de tous les revenus totaux de la planète.
Et de ces 1318 compagnies, un petit noyau de seulement 147 multinationales se trouvait au coeur de ce vaste réseau d'interconnexions planétaires.
Ainsi, une société au coeur du noyau est connectée en moyenne à 20 autres sociétés en périphérie qui, à leur tour, possèdent chacune 20 autres connexions. Par exemple, par l'entremise de la participation d'un actionnaire A dans une société B, qui détient des actions dans les sociétés C, D et E, l'actionnaire A se retrouve alors actionnaire dans B, C, D et E à la fois. Résultat : les 147 multinationales se contrôlent entre elles.
Alors peut-on parler de libre concurrence ou encore de libre marché entre tout ce petit monde tricoté très serré qui agit selon des intérêts communs? Les trois chercheurs n'osent pas parler de monopole, mais ils reconnaissent que des interconnexions aussi étroites peuvent parfois jouer des tours. Ici, on pense au fameux krach boursier de 2008, où les marchés se sont subitement disloqués.
Le château de cartes
Car cette étroite et étonnante proximité dans cette infrastructure financière complexe entre tous ces financiers démontre certes une extrême fragilité lorsqu'ils doivent affronter des vents contraires.
Alors on fait quoi en cas de choc des plaques tectoniques? Les chercheurs soutiennent que leur étude permet maintenant de noter les aspects vulnérables du système tout en identifiant les maillons faibles. Une société en détresse peut rapidement faire des ravages tel un château de cartes qui s'effondre. Exemple : la faillite de la banque d'affaires Lehman Brothers en 2008.
Suivant cette logique, on comprend un peu mieux pourquoi de plus en plus de grands gestionnaires de portefeuilles préfèrent maintenant concentrer leurs avoirs dans un cercle restreint de titres de sociétés. La Caisse de dépôt et placement, qui a perdu 40 milliards $ en 2008 (rendement de - 25 %), vient d'ailleurs de changer de stratégie sur la composition de son portefeuille boursier.
La Caisse, qui possède des participations dans plus de 500 sociétés cotées en Bourse, promet de recentrer ses investissements dans moins de titres boursiers. Une centaine, tout au plus.
En clair, la Caisse investira dans des sociétés capables de livrer un rendement plus stable, dotées d'une forte équipe de direction et offrant un dividende important.
Tiens, tiens, tiens. Une stratégie d'investissement dite «valeur» qui ressemble étrangement à celle prônée par le gestionnaire Warren Buffett chez Berkshire Hathaway.
Comme quoi si on ne connaît pas les bijoux, il faut au moins connaître le bijoutier.
>> SYSTÈME FINANCIER
Les 20 poids lourds
1. Barclays
2. Capital Group
3. Fidelity Investments
4. AXA
5. State Street Corporation
6. JP Morgan Chase
7. Legal & General Group
8. Vanguard Group
9. UBS
10. Merrill Lynch
11. Wellington Management
12. Deutsche Bank
13. Franklin Resources
14. Credit Suisse Group
15. Walton Enterprises
16. Bank of New York Mellon
17. Natixis
18. Goldman Sachs Group
19. T Rowe Price Group
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